Le tourisme, l’éco-tourisme et le capitalisme.

Savoir n’est pas connaitre

Bon j’écris un petit truc qui méritera surement des recherches sociologiques, économiques et anthropologiques beaucoup plus approfondies. Mais cet article part de l’enlisement que j’ai eu avec Quique, l’équatorien avec qui j’ai parlé pendant presque 3h à propos du tourisme, des nationalités en voyages, des deux principaux types de voyages que sont le voyage organisé et le voyage plus longue durée en sac à dos.

Je commence par le commencement. Quique tiens une petite boutique d’artisanat sur la place centrale de Misahualli, un petit village dans l’Amazonie équatorienne. On entre donc dans sa boutique avec le copains pour regarder un peu ce qu’il avait comme collier, bracelet, statuette…
Il nous demande d’où nous venons et nous répondons très honnêtement « Francia ». A partir de là, il se met à nous parler des français, du capitalisme, de l’eurocentrisme, du néocolonialisme que le tourisme provoque etc… Évidemment, nous sommes à peu près sur la même longueur d’onde, donc on essaye tant bien que mal de lui répondre, de converser avec lui, bien qu’il nous coupe régulièrement la parole et qu’on arrive difficilement à en placer une.

Il me raconte

La discussion continue, les copains s’en vont et je reste seul avec lui à l’écouter parler et à essayer de défendre mon voyage et ma vision (sans doute un peu idyllique) du voyage. Je lui dit que je ne suis pas ici pour faire le simple touriste et que je ne suis pas là pour ne pas respecter les différentes cultures de son pays. Je lui dit que je suis là pour m’inspirer des différentes luttes passé et présentes menés dans les pays d’Amérique latine. Il me répond que l’Equateur n’a plus de culture et que ce que j’appelle culture ce n’est que du folklore offert aux touristes et que tout est déjà perdu dans se pays et tous les autres d’amérique latine. Selon lui la culture de l’équateur c’est une culture coloniale et capitaliste, soit la même que la notre. Il me répond aussi que si je veux m’inspirer d’une lutte, le seul et unique pays dans lequel je doit aller c’est Cuba, car il n’y a que là que la lutte se passe, et il n’y a que dans se pays qu’il y a une véritable culture différente du monde occidental, bien que le pays fonctionne avec le système capitaliste. Il me parle aussi de son expérience en tant qu’ancien guide dans la forêt amazonienne, avec différents groupe de touristes (tours organisé et « mochileros » soit voyageur en sac a dos) de différentes nationalités. Il me raconte deux exemples de ce qu’il a vécu. Le premier se sont des mochileros français qui lui ont fait la réfélxion que pour le prix payé, c’était un peu léger comme visite et que la prochaine fois, il faudrait qu’il y ait plus de chose. Le second, ce sont des touristes américains qui sont venu pour deux semaine en tours organisé en Equateur. Ils font le tour avec lui, lui disent merci beaucoup, lui laisse un pourboire, l’invite à manger le soir et payent pour tout le monde. De ce que j’ai compris, ce sont donc ces derniers les bons touristes.

Il me raconte d’autres histoires vécues quand il à arrêter d’être guide et qu’il a commencé à tenir son petit magasin. Comme celle d’une française avec qui il a sympathisé mais qui avait trois amis qu’il ne sentais pas du tout. Cette française à tout de même voulu amener ses amis dans son magasin pour qu’il leur parle de Cuba. Apparemment, les trois gars étaient anesthésiés à la propagande internationale livrée par les journaux à propos de Cuba. Il n’a donc pas vraiment apprécié.
Il me raconte aussi d’un français en couple avec une colombienne qui avaient un enfant. Celui-ci joue avec un des enfants du village et comme n’importe quels enfants, arrive un moment ou ils se chamaillent un peu. Le petit du couple vient donc se plaindre à son père et le père va voir l’enfant du village et lui en retourne une à lui faire saigner le nez. Le gamin blessé va voir sa mère, lui raconte se qu’il s’est passé mais sa mère lui en met une deuxième « parce qu’il ne faut pas embêter un enfant de touriste, ce n’est pas bon pour l’image que donne les gens du pays à l’international » (à peu de chose près et en espagnol). L’enfant va donc seul se cacher dans la foret, encore blessé. Quique, qui n’a pas vu l’histoire, va se promener dans la foret et entend des pleurs. Il se dit que ça n’a rien de normal, il se met donc à la recherche de l’endroit où est caché l’enfant. Il le trouve, et lui demande ce qu’il s’est passé. Il ramène l’enfant chez sa mère, engueule la mère et cherche quelque chose pour venger le gamin. Je ne raconterai pas ici ce qu’il à fait, d’une part parce que je n’ai pas tout compris et d’autre part parce que ça n’a pas grand intérêt et ça n’a pas à être raconter en publique. Il aura juste réussi son coup, même si je ne pense pas que le père français aura vraiment compris la porté de son geste à la base.
Il me dit aussi qu’il à déjà vu des mochileros acheter deux ou trois place dans le bus étant donné que ça coute pas grand chose pour nous, occidentaux voyageurs, pour pouvoir s’assoir à coté de leur sac. Or cela s’est fait aux dépens de voyageurs locaux agés qui ne pouvaient pas s’assoir alors que sur une des places assise gisait un sac à dos d’abrutis. Et apparemment le mochilero se sentait dans son droit vu qu’il avait acheter ses places. Evidemment, je lui ait bien fait comprendre que je trouvais ça aberrant et que n’importe où dans le monde, c’est un manque de respect.

Il me raconte aussi qu’il a fait une « étude sociologique » auprès de plusieurs guide d’équateurs pour qualifier les différents touriste et tourismes. Il me sort donc une sorte de classement qui ne me parait pas très objectif des « meilleurs touristes » et des « pires touristes » selon les nationalités. On trouve donc dans le quintet de tête des pire touristes, les français, les belges et suisse francophones, les allemands et les espagnols de certaines régions. Dans le quintet des des meilleurs, il y a les américains, les neo zélandais, les anglais, les canadiens (en fait tout le Commonwealth à peu de chose près) et les espagnols des autres régions. Il me dit aussi que les meilleurs touristes (les plus respectueux, gentils, compréhensifs…) sont ceux qui voyagent en tours organisé et que les pires sont les mochileros surtout quand il voyagent longtemps. Je fait donc partis des 1/20000 mochileros voyageant 6 mois ou moins qui sont gentils et respectueux. Vraiment, ça me touche !

3h de discussion ça en fait des choses à se dire

On aura aussi parlé d’autres choses, comme des singes qui sont dans la villes parce qu’ils ont été retirés sciemment de leur habitat naturel pour les touristes venus ici, d’un français qu’il a rencontré et qui à garder contact avec lui, qui était en total accord avec lui, qui lui à même écrit des textos pour lui dire que le séjour qu’il venait de faire dans une communauté dont je ne me souviens plus le nom était vraiment immonde, tout était fait pour les touristes et plus rien ne paraissait naturel. Et aussi de l’éco-tourisme et du volontariat qui pour lui est une béquille du capitalisme et un néo-colonialisme vert et pas vraiment de la découverte. Il a pas tout à fait tord sur certains points mais je ne me souviens plus vraiment la façon dont il en parlait, il est donc difficile de développer cela plus que ça.

Juste avant de se quitter, (mes amis m’attendaient pour aller manger), une française et une équatorienne vienne à notre rencontre pour nous vendre des petites friandises pour financer je ne sais plus trop quoi. Il se moque donc un peu de moi, me dit que je devrait aider ma compatriote… Les friandises étaient à 40ct l’une. Il essaye de négocier 4 pour un dollar, le mythe s’effondre un peu sachant qu’il m’a parlé des mochileros comme des salaud qui négociaient tout le temps parce qu’il n’avaient pas de sous. Je veux lui filer 25ct pour combler un peu la différence et il m’envoie balader en disant que si je voulais en acheter, je faisais mon affaire et que lui faisait la sienne… Je n’essaye pas de comprendre, je dirai donc que c’est culturel… (comme disait un suisse rencontré au Mexique à propos de ce qu’il ne parvenait pas à comprendre dans son voyage).

Début de réflexions sur le voyage

Bon, que retenir de cette rencontre, de cette monologue discussion et quelles questions cela soulève-t-il ? Il faudrait commencer par « qu’est-ce que le tourisme » et continuer par « quels sont les tourismes » mais je n’ai pas envie de me lancer dans ces questions ici. D’une part parce qu’elles demandent beaucoup de réflexion et un bagage théorique important et d’autre part parce que j’écris un article et pas un essai…

En tout cas, il m’a parut intéressant d’avoir l’avis d’un local, qui plus est, ancien guide, sur le tourisme dans son pays. C’est un avis complètement subjectif et je crois qu’il est important de le prendre de cette façon (d’après ma subjectivité…). D’autant qu’après cette discussion, on a croisé un couple de québécois installé à Canoa (en équateur donc, pour ceux qui suivent pas) depuis un certain temps. Ils nous ont dit que le gars n’avait jamais voyagé de sa vie et qu’il leur avait sorti le même discours. En fait c’est le genre de gars qui lit des bouquins et qui se renseigne sur internet pour faire des généralités et croire qu’il connait tout sur tout. Son avis est donc grandement à nuancer, mais ses expériences m’ont interpelés.

En effet, avant cette discussion j’avais une vision totalement inverse. Pour moi les mochileros étaient des gens respectueux, avec une envie de découvrir une culture différente, de se découvrir eux même en allant connaitre des choses différentes. Et je pense qu’il ne peut pas y avoir d’envie de découverte sans un profond respect pour les personnes en faces. Quoique, en écrivant cela, je viens de me rendre compte que les colons avaient une énorme envie de découverte et absolument aucun respect… Et a contrario, les voyageurs en tours organisés, de ce que je pensais n’en n’ont que faire du pays dans lequel ils sont, tant qu’ils sont dépaysé et qu’il en ont pour leur argent. Ils ne font pas d’effort pour parler la langue, pour connaitre les gens etc… Eh bien maintenant je serai quand même plus nuancé, et je ferai attention au comportement des voyageurs que je rencontrerai, qu’ils soient voyageurs en tours organisés ou voyageur au long court. Je tenterai aussi de faire attention aux réactions des locaux par rapport à mon comportement. En tout cas, la vision de mon voyage n’est en rien modifié profondément par cette conversation, bien que je me sois posé des questions pendant le repas qui a suivi. Toutefois je crois que cela m’aura permis de faire émerger une réflexion à propos de mon approche du voyage en général et des liens interculturels que permettent les voyages. Comment voyager sans coloniser, même sans le vouloir, comment permettre aux gens d’un pays de vivre du tourisme sans dénaturer les cultures locales, comment vouloir découvrir une culture différente sans manquer de respect ?… Tout un tas de questions aux réponses encore floues dans les mots, mais auxquelles chaque voyageur doit tenter de répondre par les actes.
Le problème étant que chaques rencontres influent à la fois sur les deux parties, la vraie question est comment réussir à ne pas imposer ou donner envie de suivre son système de pensée et d’être, tout en étant dans l’échange profond ?

Déconstruction et décolonisation mentale

Nous avons tous un travail de décolonisation et de déconstruction intellectuelle intense à effectuer si on ne veux pas que se perdent dans l’oubli des milliers de spécificités culturelles séculaires voire millénaires. Car la société capitaliste et la « culture » occidentale « harmonise » la vie selon ses propres principes et colonise nos façons de penser, de discuter, d’entrer en contact…
Déconstruisons-nous et peut-être que les cultures minoritaires que nous cherchons à rencontrer en voyageant réussirons à continuer de se construire et de vivre selon leurs propres principes et pas en faisant image pour le touriste venu admirer le folklore…

Bonus : vidéo d’un interview de Quique dans son échoppe

En bonus, je mets les quatre parties de l’entretient fait entre un français mochilero (celui dont je parle dans l’article) et Quique. J’ai un peu la flemme de traduire pour l’instant mais peut être que je le ferai un jour. C’est à peu de chose près un condensé de ma discussion avec lui.

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